dimanche 4 octobre 2009





Les bonnes choses, toujours les bonnes choses :

Avec Kyoto, ma colocataire dont le prénom me fait quand même un peu penser à une chanson de Modest Mouse (& it's true we named our children after towns we had never been to) -- acheter de la bière à numéro, petit vestige communiste du temps où le branding imaginatif était pas particulièrement nécessaire, & essayer de déterminer laquelle est la meilleure. (La neuf, plus foncée que la huit? La sept, blonde mais peut-être un peu trop pâlotte?) Se pratiquer ensemble à chanter l'hymne national russe, dont les paroles remaniées sont écrites dans un de ses manuels de droit. Partager une bouteille de vin rouge sucré & parler parler parler jusqu'à deux heures du matin, emmitouflées jusqu'aux oreilles dans notre chambre trop froide. Marcher pendant quatre heures pour traverser la Moskova & déboucher sur une base de plein air inespérée, blottie aux pieds de petites collines rondes. S'émerveiller devant la première poubelle à recyclage que nous voyons depuis notre arrivée à Moscou.

Avec Rita, la voisine roumano-allemande mince comme un garçon de onze ans, les poignets d'une délicatesse touchante -- préparer du borscht from scratch & le déguster après y avoir fait fondre lentement trois grosses cuillerées de crème sûre à quarante pour cent de matières grasses. Emprunter une guitare à un des Américains du sixième pour qu'elle puisse extirper son répertoire de veilles chansons russes de ses valises & nous faire fredonner, toute une soirée durant, des mélodies qui parlent de chats noirs superstitieux & d'automnes révolutionnaires. L'entendre dire que secrètement elle a toujours voulu tomber amoureuse en Russie, & espérer très fort que ça lui arrive.

Avec Porcelaine, l'autre voisine qui elle est québécoise, les yeux grands comme ça & l'enthousiasme facile -- acheter des billets pour Franz Ferdinand, Franz Ferdinand à Moscou! S'émerveiller ensemble de nos amoureux respectifs, tous deux trèstrès loin à Québec, avec dans la voix comme une grande tendresse, une tendresse lumineuse & inattaquable. Sortir très tard le soir pour acheter une bouteille de vodka au Магниоля ouvert vingt-quatre heures puis revenir chez elle pour le boire tout doucement, à coup de petits verres qui tue tous les microbes de nos grippes d'automne.

Avec Baloi & Chuck qui coulent leur vie à Limoilou & Boucherville, respectivement, & qui demeurent encore les deux meilleures amies que j'ai jamais eu -- prendre sournoisement des photos de Russettes en talons très hauts pour les leur montrer, leur dire preuve à l'appui!. S'envoyer mutuellement des vidéos de crocodiles qui chantent joyeux anniversaire en russe. Écrire de longs courriels qui parlent de Jeannettes & de cathéter veineux & de concoctions suspectes à base de vin rouge & de liqueur noire ; prendre des nouvelles & donner des nouvelles, les avoir tout près même si elles sont très loin.

& avec Juillet, Juillet qui m'écrit des messages rendus presque incohérents parce que pleins à craquer de parenthèses & de points d'exclamation, Juillet qui me promet de m'envoyer du café équitable & biologique & tout ce que tu veux, guatémaltèque ou kenyan ou quoi? -- surtout parce que je passe mon temps à me plaindre de l'horrible café instantané que j'ingère ici. Juillet qui me dit que je suis jolie même quand je le suis pas, les yeux encore cernés de sommeil à sept heures du matin, à lui parler sur Skype parce qu'avec le décalage horaire c'est le seul moment qui fasse l'affaire. Juillet qui me demande, faussement nonchalant, si je veux venir te voir, c'tu ben compliqué?.



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